Tatouage : CAP ou pas CAP ?

  
 

 

 

Notre communauté tattoo est étonnante… ou détonante, suivant le côté duquel on se place.

 

Nous revendiquons un statut depuis plusieurs années maintenant, que ce soit celui d’artiste ou d’artisan suivant les sensibilités. Et quand enfin la classe politique se penche dessus, certains trouvent à y redire.

 

Bon, je vais parler de ce qui nous concerne nous et de nos démarches auprès des ministères pour l’obtention du statut d’artisan d’art (au sujet duquel nous avons eu récemment une réponse encourageante de la part de l’Institut des Métiers d’Art).

 

Nous avons besoin d’un statut et celui d’artisan d’art est celui qui colle le mieux à la réalité du «  métier ».

 

Il faut tout simplement voir que le « métier » de tatoueur requiert une maitrise de la technique, un savoir-faire avant même de parler d’un quelconque côté artistique.

 

Être tatoueur c’est, avant tout, répondre à une demande qu’on peut certes orienter, accompagner voire aider à modifier mais cela reste cependant répondre à une demande principalement.

 

Alors oui, on va nous servir le couplet de l’artiste tatoueur… Je répondrais : tout dépend de ce qu’on appelle de l’art. L’art est subjectif et ne souffre aucune limite à part celle de l’imagination de celui ou celle qui crée. Ce qui paraît compliqué quand le support est l’autre.

 

Alors qu’est-ce qu’un artiste ? C’est dans la définition du dictionnaire une personne qui crée une œuvre d’art.

 

Alors donc qu’est-ce qu’une œuvre d’art dans le tatouage ? Quelque chose de beau et qui initie une émotion ? Le beau et l’émotion sont subjectifs et personnels à chacun donc…

 

Refaire une peinture de Frazetta ou une image Google en tattoo, un portrait, un dragon japonais, un Mucha, des vitraux… Est-ce que cela peut s’apparenter à la création d’une œuvre d’art ou est-ce seulement la maitrise d’une technique qui permet de reproduire ce qu’on nous a demandé ?

 

Alors oui on peut y mettre sa patte, son style, mais à moins d’en avoir inventé un comme Guy Aitchison pour n’en nommer qu’un, qui pour le coup entrerait dans la catégorie artiste tatoueur, beaucoup ne se contentent que de des styles existants et c’est donc – on y revient – un savoir-faire qui se maitrise.

 

Artisan d’art : voilà donc qui mélange les deux aspects tout en valorisant franchement la maitrise artisanale de la profession, la transmission du savoir par la relation maitre-élève et un vrai cadre juridique et fiscal qui nous permettrait d’avancer sur des aspects tels que la possibilité d’avoir légalement des apprentis (avec une sécurité à la fois pour les patrons mais aussi pour les apprentis), de pouvoir obtenir une assurance professionnelle afin de nous garantir de soucis qui pourraient advenir suite à un tattoo, ce qui n’est pour le moment pas possible.

 

Libre à celui qui a une volonté artistique de la mettre en valeur et rien ne l’en empêche.

 

Les artisans d’art sont des artisans qui créent des merveilles tant sur commande que surgit de leur imagination tout comme les tatoueurs en fait. Et il est loin d’être facile de devenir un artisan d’art.

 

Alors oui, ce fait d’actualité fait ressurgir ce problème du statut et donc de la formation : sans l’un, pas de possibilité d’avoir l’autre.

 

Comment former à une profession qui n’existe pas ?

 

Donc Mme Najat Vallaud-Belkacem nous dit être favorable à un CAP, mais c’est une excellente nouvelle, pas le CAP car nous sommes d’accord, ce n’est pas le diplôme adapté à notre « profession ». Mais ce qui est franchement encourageant, c’est de voir qu’après nos courriers et contacts nos politiques se penchent enfin sur le dossier tatouage.

 

Il faut donc pouvoir les aider, les orienter au mieux afin de ne pas subir des décisions qui ne seront pas adaptées à nos façons de travailler et se retrouver avec un statut d’esthétichiens (pour faire un raccourci entre le statut d’esthéticiennes et de toiletteurs, ce qui est le cas de nombre d’entre nous actuellement).

 

Nous devons montrer notre volonté de travailler avec eux, amener des propositions afin de faire évoluer notre situation dans le meilleur sens possible.

 

Ils légifèreront avec ou sans nous, mieux vaut avec nous.

 

Je voudrais tout d’abord mettre les points sur les i concernant certaines réactions médiocres et méchantes que j’ai pu lire suite à l’article concernant le CAP. Il n’y a rien de médiocre bien au contraire à être en CAP, à le vouloir ou à en avoir un. Au contraire, je trouve que vouloir se fondre tôt dans le monde du travail dénote une grande maturité et une belle persévérance. En tout cas nous ne cautionnons pas ces commentaires qui en plus d’être inutiles sont arrogants et prétentieux.

 

Toujours est-il que le CAP n’a jamais été demandé par notre association alors que le CQP a quant à lui été proposé par le SNAT.

 

Donc ce CAP n’est pas la forme qui nous semble être pertinente concernant le « métier » de tatoueur.

 

Nous proposons plutôt de pouvoir rejoindre une section en école d’art afin d’être formé à la photo, la peinture, le dessin, l’histoire de l’art… module artistique qui devrait être complété par des modules administratif, commercial, d’hygiène et dermatologique.

 

Il faudrait que l’entrée puisse se faire sur dossier afin de voir que des bases sont déjà présentes et éviter un risque de surpopulation de tatoueurs, comme on peut le vivre actuellement ou rien ni personne n’empêche qui que ce soit d’ouvrir sa boutique avec pignon sur rue.

 

La formation comme nous le disions devrait se faire chez un maitre d’apprentissage et le compagnonnage même international pourrait être envisagé pour la fin du cursus afin de permettre à l’apprenti de voyager et d’enrichir sa formation.

 

Nous sommes de fervents détracteurs de ces écoles privées de tatouage qui fleurissent partout en France et un cursus tel que nous l’envisageons éviterait à ces écoles ou centres de formation de ne voir les apprentis tatoueurs que comme une colonne de leur chiffre d’affaire et qui inondent le marché de tatoueurs formés en 15 jours.

 

Cécile Chaudesaigues, membre de Tatouage & Partage