Au fait, à quand un statut pour les tatoueurs ?

  
 

Secrétaire de l’association Tatouage & Partage, Kalil Moktar signe une nouvelle tribune sous forme de question : à quand un statut pour les tatoueurs ?

 

Dans les divers articles et tribunes que l'association Tatouage & Partage publie sur son site, il est toujours fait mention, dans ses projets, d'obtenir le statut d'artisan pour les tatoueuses et tatoueurs français.

 

À l'heure où nous écrivons ces phrases, aucun statut légal ne représente notre profession.

 

Pour les personnes qui suivent un tant soit peu l'actualité du tatouage, nous faisons face à une explosion d'ouvertures de salons. Nous ressassons sans cesse qu'il est trop facile d'ouvrir une boutique car aucun justificatif n'est nécessaire.

 

On s'accordera à dire que beaucoup de salons n'offrent pas un travail sérieux. Il ne suffit pas de se dire qu'on a fait une formation de trois jours puis d’avoir acheté quelques planches de flash pour se dédouaner d'un savoir-faire et d'une maîtrise de qualité. Les plus expérimentés des tatoueurs et des passionnés chez les tatoués constatent ce fait.

 

On voit sur les tatoué(e)s, à la télévision et les réseaux sociaux, un nombre effarant de "tatouages" techniquement ratés, artistiquement douteux. Il y a même certains "tatoueurs" qui se targuent d'avoir suivi des formations dans des écoles autoproclamées "école de tatouage". Ces mêmes gogos qui ont payé une véritable fortune pour une formation bien médiocre au vu des résultats présentés sur l'internet.

 

Je vous fais l'impasse sur les émissions télévisées qui caricaturent le monde du tatouage telles qu'on a pu les voir sur M6.

 

Et pourtant, Il y a des tatoueurs talentueux dans notre pays. Des jeunes qui sont en train d'anoblir notre activité. Ils y consacrent des heures par jour pendant des années.

Mais tous s'accordent à dire que la formation qu'ils ont reçue, ils la doivent aux patrons de salons qui les ont accueillis. Que seuls, ils n'y seraient jamais arrivés.

 

Pour un vrai passionné, le parcours est compliqué mais il s'accroche, contrairement à tous ces opportunistes qui n'ont qu'un seul but : gagner malhonnêtement de l'argent parce que l'activité du tatouage est en plein essor. Ces mêmes parasites qui vont jusqu'à sacrifier les prix pour attirer la clientèle dans leurs boutiques au détriment de la qualité.

 

Le passionné connaît ses limites et sait que sans l'aide d'un enseignement rigoureux, il ne pourra améliorer son niveau.

 

Pour que le métier de tatoueur(se) puisse tenir sur la longueur, il lui faut un encadrement sérieux, une formation aboutie, une déontologie propre au monde du tatouage.

 

Pour le passionné, ça ne changera rien car il faudra quand même qu'il fournisse un travail sérieux. En revanche, un statut adapté renverrait les sangsues aux oubliettes.

 

Il est quand même paradoxal qu'en France, il y ait des émissions dédiées au tatouage, des conventions partout dans l'hexagone, que 10 000 boutiques, ou peu s'en faut, aient pignons sur rue, que des millions de gens (10 % de la population) soient tatoués mais que nous n'ayons pas de statut légal pour nous représenter officiellement.

 

Stéphane Chaudesaigues, fondateur de l'association Tatouage & Partage, propose depuis quelques années le statut d'artisan d’art pour encadrer la profession.

 

Il faudrait dans un premier temps que l'activité de tatouage puisse être listée dans le répertoire des métiers de l'artisanat d’art. C'est ce à quoi s'emploie Stéphane Chaudesaigues.

 

Ensuite, pour les tatoueur(se)s déjà installé(e)s depuis quelques années (à définir), il faudrait obtenir un titre homologué pour avoir la qualité d'artisan d'art. Ce qui est logique vu qu'on ne peut être certifié, breveté ou qualifié pour une profession inexistante pour le moment.

 

L'obtention du titre prestigieux de Maître artisan se complexifie un peu. Hormis les années de pratiques nécessaires comme expliqué ci-dessus, le candidat à la maîtrise devrait avoir de solides notions en gestion, en psychopédagogie, hygiène et soins, informatique, dessin, histoire du tatouage etc.

 

L'apprentissage se pratiquerait en alternance chez un tatoueur qui aurait l'aval des autorités pour avoir le droit d'enseigner.

 

Au bout d'un nombre d'années à définir, l'apprenti se verrait remettre soit un diplôme, soit une attestation confirmant qu'il a suivi une formation de tatoueur et qu'il peut conséquemment créer un salon de tatouage officiellement.

 

Le statut d'artisan permettrait également à la conjointe ou au conjoint d'obtenir le statut de collaboratrice ou de collaborateur qui lui donnerait le droit à une couverture sociale et de comptabiliser des points pour la retraite.

 

Dans la foulée, nous pourrions également demander qu'une loi oblige les vendeurs de matériel de tatouage à demander à leurs client(e)s un numéro de SIRET.

 

Tatoueuses, tatoueurs, décidons du futur de notre métier. Défendons-le des opportunistes, des émissions de télévisions racoleuses. Montrons ce qu'est le monde du tatouage de nos jours chez les vrais passionnés. Avec un statut digne de ce nom, nous aurons un socle solide pour montrer à tous les futurs tatoué(e)s que nous sommes des gens responsables et sérieux.

 

Kalil Moktar

Secrétaire de Tatouage & Partage