L’artisanat d’art pour les tatoueurs, c’est quoi ?

  
 

 

À Murat, ville de la région Auvergne-Rhône-Alpes où Tatouage & Partage avait travaillé à la création du premier cursus d’études de tatoueur gratuit reconnu par l’État, une nouvelle édition du festival des métiers d’art a eu lieu cet été. L’occasion de revenir sur ce qu’est l’artisanat d’art, et pourquoi notre association milite pour intégrer le tatouage à cette noble famille.


 

Le succès du festival des métiers d’art de Murat

Devenu au fil des éditions un événement à part entière – quelques 4 000 visiteurs dénombrés en 2018 pour une ville en comptant moitié moins à l’année longue –, le festival des métiers d’art de Murat montre l’intérêt, voire la fascination que portent les Français envers l’artisanat d’art. Dans cette cité médiévale, ils sont chaque été une cinquantaine à exposer leur savoir-faire ancestral et à exhiber leur métiers : du maroquinier à la fileuse de laine en passant par le bijoutier, le coutelier ou encore le céramiste.


 

281 professions considérées officiellement comme "métiers d’art"

Mais qu’est-ce au juste que cet artisanat auquel on appose "d’art" ? L’artisanat d’art est une discipline exercée par un artisan dit "d’art", c’est-à-dire un professionnel qui exerce une activité artisanale comprise dans une liste précise de 281 métiers. Ces 281 métiers sont répertoriés par l’Institut National des Métiers d’Art (INMA). Les points communs de ces professions ? Elles sont "l’héritage de savoir-faire précieusement élaborés au fil des siècles", et s’intègrent dans l’un des 16 domaines d’activité établis par l’INMA :

  • Ameublement et Décoration (exemple : ébéniste)

  • Architecture et Jardins (exemple : tailleur de pierre)

  • Bijouterie, Joaillerie, Orfèvrerie, Horlogerie (exemple : graveur)

  • Céramique (exemple : décorateur sur céramique)

  • Cuir (exemple : maroquinier)

  • Facture instrumentale (exemple : restaurateur de guitares)

  • Jeux, Jouets et Ouvrages mécaniques (exemple : fabricant de figurines)

  • Luminaire (exemple : fabricant d’abat-jour)

  • Métal (exemple : coutelier)

  • Mode et Accessoires (exemple : chapelier)

  • Papier, Graphisme et Impression (exemple : enlumineur)

  • Restauration (exemple : restaurateur de photographies)

  • Spectacle (exemple : costumier)

  • Tabletterie (exemple : nacrier)

  • Textile (exemple : brodeur)

  • Verre et Cristal (exemple : verrier fondeur)


 

 


 

Le regard de la loi sur l’artisanat d’art

L’artisanat d’art est un secteur reconnu par la loi, qui admet en lui un patrimoine immatériel faisant partie de notre culture, accueillant des professionnels "[s’illustrant] dans des champs très variés et parfois inattendus". C’est l’article 20 de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises qui donne une définition légale des métiers d’art. Il dit :


 

Relèvent des métiers d’art […] les personnes physiques ainsi que les dirigeants sociaux des personnes morales qui exercent […] une activité indépendante de production, de création, de transformation ou de reconstitution, de réparation et de restauration du patrimoine, caractérisée par la maîtrise de gestes et de techniques en vue du travail de la matière et nécessitant un apport artistique.


 

La loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de création, à l'architecture et au patrimoine reconnaît, pour sa part, officiellement les métiers d’art comme secteur à part entière. L’article 44 de cette même loi accorde, enfin, une liberté aux artisans d’art. Il reconnaît en effet la pluralité des statuts des professionnels des métiers d’art, stipulant que ces personnes "peuvent donc être aussi, notamment, des salariés d’entreprises artisanales ou de toute autre personne morale ayant une activité de métiers d’art, des professionnels libéraux, des fonctionnaires ou des artistes auteurs".


 

Les menaces liées au manque de statut pour les professionnels du tatouage

Depuis plusieurs années, Tatouage & Partage tente d’apporter une réponse à l’une des principales interrogations des tatoueurs de France : quel statut obtenir pour la profession ? En dépit d’une démocratisation galopante, les tatoueurs de ce pays manquent toujours d’un socle commun reconnaissant le tattoo comme un métier à part entière. L’INSEE les a affublés du matricule 9609Z, code les rangeant dans la même catégorie que les toiletteurs de chiens, les agences matrimoniales et les tarologues – entre autres... Un non-sens pour tout un corps de métier.


 

Pire encore. Qui dit manque de statut officiel dit :

  • impossibilité de former officiellement des apprentis

  • impossibilité de reconnaitre la participation du conjoint collaborateur (or, nombreux sont les hommes et femmes travaillant aux côtés de leur époux ou épouse au sein d’un même studio)

  • impossibilité de bénéficier d’une assurance professionnelle


 

 


 

Pour l’intégration du tatoueur aux métiers d’art

Tatouage & Partage est pour l’obtention d’un statut d’artisan pour tous les tatoueurs, et d’un statut d’artisan d’art pour la minorité de tatoueurs proposant une production unique de l’esprit – autrement dit ceux pouvant répondre à la définition d’ « artiste ». Avec le statut d’artisan simple, notre association pense aussi aux tatoueurs, majoritaires, qui vont effectuer une simple prestation de service en répondant à la demande d’un client. Ce statut d’artisan n’empêche pas d’être inscrit à la Maison des Artistes pour des œuvres originales et uniques. Une TVA différente s’appliquerait pour le statut d’artisan d’art et pour le statut d’artisan simple, comme le souhaite une grande partie de la profession.


 

Aujourd’hui, notre association a la certitude que l’obtention d’un véritable et protecteur statut pour tous les tatoueurs de France n’est qu’une question de temps. Une perspective qui nous réjouit, et nous pousse à redoubler nos efforts.