Réservation d’une date : arrhes ou acompte ?

  
 

Tatoueuses, tatoueurs,

 

Quotidiennement, lorsqu'un client réserve auprès de vous une date pour effectuer un dessin ou un tatouage, une majorité d'entre vous demande que ce client verse une somme d'argent. Cette somme d'argent vous sert à bloquer un jour précis et une plage horaire pour lui, en vous assurant, soit de sa venue, soit que son absence ne sera pas une perte sèche, financièrement parlant. D'un shop à un autre, les tatoueuses et tatoueurs demandent soit des arrhes, soit des acomptes, soit une somme d'argent sans préciser qu'il s'agit de l'un ou de l'autre. Mais les mots ont un sens, et surtout, ils ont des conséquences juridiques voire judiciaires*. Voici une explication rapide et simple de cette problématique.

 

Les arrhes

 

Lorsque vous demandez des arrhes à un client pour fixer une date, ce dernier va vous remettre une somme d'argent. Cette somme correspond à deux choses :

 

• une avance sur le prix final

• une faculté de se dédire (de se désengager)

 

Il y a alors trois hypothèses possibles :

 

• Si le client vient à son rendez-vous, que le tatouage est effectué en une ou plusieurs séances, vous imputez cette somme sur le prix final, et tout est réglé sans aucune difficulté.

• Si le client ne vient pas au rendez vous, vous pouvez conserver la dite somme, et les choses s'arrêtent là. Vous avez perdu votre temps mais gagné le montant des arrhes, et le client a perdu cette somme. Il a usé de sa faculté de se dédire, de se désengager, en ne venant pas, il ne peut pas vous demander de lui rendre la somme.

• Si l'annulation du rendez-vous est de votre fait, soit que vous ne venez pas, soit que vous annulez à l'avance, vous devez non seulement rendre la somme que vous avez prise au client, mais lui donner en supplément ce même montant. Donc vous devez lui rendre le double des arrhes.

 

L’acompte

 

Lorsque vous demandez un acompte à un client pour fixer une date, il va également vous remettre une somme d'argent. Cette somme est un commencement d'exécution du contrat de prestation de service qu'est la réalisation du tatouage en échange d'une somme d'argent.  Là aussi, trois hypothèses sont possibles :

 

• Si le client vient à son rendez-vous, que le tatouage est effectué en une ou plusieurs séances, vous imputez cette somme sur le prix final, et tout est réglé sans aucune difficulté.

• Si le client ne vient pas à la séance, il se rend coupable d'une faute contractuelle. Vous êtes en droit de lui réclamer des dommages et intérêts. Vous n'avez pas à le rembourser.

• Si l'annulation du rendez-vous est de votre fait, vous vous rendez coupable d'une faute contractuelle, le client est en droit de vous réclamer des dommages et intérêts.

 

S'il s'agissait d'une simple vente, le client pourrait vous obliger à lui remettre le bien ou vous pourriez l'obliger à l'acheter. S'agissant d'un tatouage, le client ne peut pas vous forcer à le tatouer, et vous ne pouvez évidemment pas le forcer à se faire tatouer. Voilà pourquoi les choses se règlent par des dommages et intérêts d'un côté comme de l'autre. Ces dommages et intérêts sont évalués à la hauteur du préjudice subi (c'est donc très variable !).

 

En résumé…

 

On le voit, les conséquences ne sont pas du tout les mêmes :

 

• Avec les arrhes, vous ou votre client pouvez décider de ne pas exécuter le contrat de tatouage en vous acquittant d'une somme préalablement fixée, sans que cela ne vous soit reproché.

• Avec les acomptes, comme on considère que le contrat est commencé, vous vous engagez tous deux à finir ce contrat. Ne pas le finir peut être reproché à la partie fautive, qui peut être condamnée à payer des dommages et intérêts à l'autre partie.

 

Bon à savoir !

 

Si vous demandez à un client une somme d'argent pour fixer une date, sans préciser s'il s'agit d'un acompte ou d'arrhes, cette somme sera considérée comme étant automatiquement des arrhes. Au bout de trois mois, les sommes versées commencent à produire des intérêts au taux légal, qui doivent s’imputer sur le prix final. En pratique, les sommes versées pour la prise de rendez vous sont tellement faibles, et les délais étant rarement de plusieurs années, nous parlons ici d’à peine quelques euros…

 

En tout état de cause, chaque fois qu'un rendez vous est annulé, sauf si c'est au tout dernier moment, le mieux est de trouver un arrangement avec votre client, qu'il ait payé des arrhes ou un acompte. Si aucun arrangement amiable n'est possible, soit par la prise d'un nouveau rendez vous, soit par le remboursement des sommes, il reste la possibilité de régler le litige en justice, devant le Tribunal d'instance territorialement compétent (ou devant le Tribunal de grande instance si la somme en jeu dépasse les 10.000€...).

 

Benoît Le Dévédec

benoit.ledevedec@tatouage-partage.com

 

*Juridique renvoie au droit en général, alors que judiciaire renvoie plus spécifiquement à l’hypothèse d’un procès.

 

Textes de référence :

 

Code civil : Article 1590

Code de la consommation : Chapitre IV : Arrhes et acomptes : Article L214-1 à L214-4.